#Geneatheme – Mort au combat : Léon Augustin Bouquillon
Le #geneatheme est un des rendez-vous mensuels immanquables, initié par Sophie Boudarel et repris par Geneatech …
Voici celui du mois d’octobre 2023 :
Rédiger un article autour d’un ou de plusieurs morts au combat.
Léon Augustin Bouquillon (1893 – 1915)
Nous sommes à la mairie de Wavrin (Nord) ce samedi 15 juillet 1893, il est dix-huit heures.
Jules Bouquillon, terrassier de son métier, vient déclarer la naissance de son fils Léon Augustin, né à quatre heures ce matin. La maman s’appelle Sidonie Loison, elle est garde-barrière à Wavrin.
Jules et Sidonie ont respectivement quarante-deux et trente-huit ans. C’est leur sixième enfant.
L’an mil huit cent quatre-vingt-treize, le quinze juillet à six heures du soir, par devant nous Achille Louis Pinteaux, Maire officier de l’état civil de la commune de Wavrin, canton d’Haubourdin, arrondissement de Lille, département du Nord, a comparu Jules Joseph Bouquillon, âgé de quarante-deux ans, terrassier, né et domicilié à Wavrin, lequel nous a présenté un enfant du sexe masculin, né ce jour, à quatre heures du matin, de lui déclarant, en sa demeure sise en cette commune rue du vert touquet, et de Sidonie Loison, âgée de trente-huit ans, garde barrière, son épouse, et auquel il déclare vouloir donner les prénoms de Léon Augustin ; ladite déclaration et présentation faite en présence de Célestin Lézy, âgé de trente-sept ans, cordonnier, et de François Louis Buisine, âgé de quarante-deux ans, cultivateur, tous deux domiciliés en cette commune. Le père et les témoins ont signé avec nous le présent acte, le tout après qu’il leur en a été fait la lecture ./.
AD du Nord – 1 Mi EC 653 R 002
Léon est le dernier enfant d’une fratrie composée de Charles (treize ans), Marie (onze ans), Léocadie (neuf ans), Jules (trois ans), et Angèle (20 mois).
1906
Le 1er avril 1906, la famille Bouquillon-Loison est présente au recensement de Wavrin, rue du Vert Touquet. Léon a treize ans. Son père est désormais cantonnier à la Compagnie de chemin de fer du Nord. Ses trois sœurs sont confectionneuses et son frère Jules raffineur.
Quant au fils ainé Charles, il vit avec sa femme Philomène Planque et son fils Gaston né en 1905, rue de la fontaine, également à Wavrin. Comme son père, il est cantonnier à la Compagnie de chemin de fer du Nord.
1913
Léon a vingt-ans le 15 juillet. Il est maintenant charpentier en fer et toujours domicilié à Wavrin.
Le 7 août 1913 la loi Barthou, dite “loi des trois ans”, allonge la durée du service militaire de deux à trois ans en vue de préparer l’armée française à une guerre éventuelle avec l’Allemagne. Le recensement des appelés s’effectue à dix-neuf ans au lieu de vingt, abaissant l’âge d’incorporation de vingt-et-un à vingt ans.
Ainsi, la classe 1913 de Léon est incorporée en 1913 et non 1914.
Il passe devant le conseil de révision qui le déclare alors “Bon pour le service“.
Il a les cheveux châtains clairs, les yeux bleus clairs, le front proéminent, le nez cave et le visage rond.
Sa taille est de 1m67.
Il sait nager et faire du vélocipède. Enfin, il sait lire, écrire et compter (Niveau d’instruction : 3).
Il est alors incorporé dès le 26 novembre 1913 (arrivé au corps le 27) au 1er Régiment du Génie.
1914
Le 1er mai 1914 il rejoint le 10e Régiment du Génie (créé le même jour), en tant que sapeur mineur, en garnison à Toul. Léon y intègre le 26e bataillon, 5e compagnie (noté 26/5).
Le 2 août 1914 c’est la mobilisation générale. Affectée au camp retranché de Toul, la compagnie de Léon travaille sans relâche à l’organisation défensive du camp.
Jusqu’au 6 octobre 1914, elle a pour mission d’organiser les sous-secteurs de Charmes, Blénod et Domgermain.
Début octobre, envoyée au combat dans le secteur du Bois d’Ailly, elle reçoit son baptême du feu. Les sapeurs ouvrent des sapes avec pour objectif la tranchée forestière du bois d’Ailly, que la division a ordre d’occuper.
Un sapeur est tué, un autre disparu et quatre sont blessés lors d’une attaque manquée.
La compagnie de Léon poursuit les sapes malgré un secteur devenu très dur en raison d’attaques et de contre-attaques incessantes. Le combat est rude et elle subit des pertes sensibles.
Le 16 novembre, la compagnie 26/5 construit un pont de radeaux de tonneaux sur la Meuse sous un bombardement sévère. Jusqu’au 11 décembre 1914, elle doit constamment rétablir le passage de la Meuse détruit de façon systématique par l’artillerie allemande.
Ainsi, jusqu’à la fin de l’année 1914, ce ne sont qu’attaques et contre-attaques et le secteur reste très agité, de jour comme de nuit. De nombreux sapeurs tombent au combat.
1915
L’année commence dans les mêmes conditions.
Le 13 février, ordre est donné d’attaquer l’ennemi sous terre par un système de mines. La compagnie 26/5 fait alors sauter son premier camouflet (contre-mine destinée à détruire sous terre une mine adverse) le 4 mars 1915. A partir de cette date, des explosions ont désormais lieu tous les jours.
Dans cette guerre terrible, gradés et sapeurs se distinguent par leur bravoure.
Aussitôt que la compagnie a fait sauter un fourneau, les troupes d’infanterie occupent l’entonnoir qu’un détachement du génie aménage.
Mais cette guerre de mines cause des pertes cruelles à la Compagnie. On déplore de nombreux mineurs ensevelis. C’est alors un assaut de dévouement entre tous pour essayer de sauver les camarades enterrés.
Nous voici le vendredi 4 juin 1915 …
Extrait du Journal des Marches et Opérations du 10e Régiment du Génie 26e bataillon.
4 juin : à 18h45 les allemands ont fait partir un fourneau fortement sous chargé détruisant leur tranchée et bouleversant notre galerie 10bis sur 8m environ, et prenant dans les décombres le caporal Courseaux Raoul et les s/m (sapeur mineur) Bouquillon et Dehaye, les travaux de sauvetage ont été entrepris aussitôt. Une partie du s/m Bouquillon a pu être dégagée.
6 juin : 1e 2e 3e section. Zone de Biolée : aménagement de la tranchée de Bois Carré, boyau entre ? Bois Carrés. Aménagement de la tranchée de Pont Neuf. Zone de Hay.
4e section. Continuation du déblaiement de la galerie, on a retrouvé le corps du caporal Courseaux, l’enterrement des 3 ensevelis a eu lieu au cimetière de la Croix à Marbotte.
Pour en savoir plus, n’hésitez pas à visiter le site de la nécropole nationale de Marbotte.
L’an mil neuf cent dix-neuf le trente mai à dix heures du matin, Nous François Crétal, Maire officier de l’état civil de la commune de Wavrin, canton d’Haubourdin, arrondissement de Lille, département du Nord, avons procédé à l’acte de transcription de décès dont la teneur suit, parvenu à huit heures du matin.
AD du Nord – 3 E 16459
L’an mil neuf cent quinze le cinq du mois de juin à dix-huit heures étant à Marbotte (Meuse).
Acte de décès de Léon Augustin Bouquillon sapeur mineur 10e Génie Compagnie 26/5 immatriculé sous le numéro mil quatre cent neuf, né le quinze juillet mil huit cent quatre-vingt-treize à Wavrin canton d’Haubourdin, département du Nord, domicilié en dernier lieu à Wavrin canton d’Haubourdin département du Nord. décédé à la tranchée Vaux Fery est (numéro 10bis) le quatre du mois de juin à dix-huit heures quarante-cinq sur le champ de bataille inhumé au cimetière de la Croix à Marbotte (Meuse).
Fils de Jules Joseph et de Loison Sidonie, domiciliés à Wavrin, canton d’Haubourdin, département du Nord, célibataire.
Conformément à l’article 77 du code civil, nous nous sommes transporté auprès de la personne décédée et assuré de la réalité du décès.
Dressé par nous Henri Jules Marie Deuil capitaine Commandant la Compagnie 26/5 10e Génie, officier de l’état civil sur la déclaration de Raymond Blondet 27 ans sous-lieutenant au 10e Génie Compagnie 26/5 et de Maurice Théophile Chambault 26 ans, sergent au 10e Génie Compagnie 26/5 qui ont signé avec nous après lecture ./.
Le malheur s’acharne sur cette famille, car son frère Jules, caporal au 365e Régiment d’Infanterie, est tué au combat le 20 juillet 1916 dans la Somme.
Le Livre d’Or de la commune de Wavrin mentionne quatre Bouquillon, dont Léon et son frère Jules. Les deux autres sont des cousins.
Tous les quatre sont aux monument aux morts de Wavrin, morts au combat.
Sources :
Historique de la Compagnie Divisionnaire 26/5 du 10e Régiment du Génie – Guerre 1914-1918 (gallica.bnf.fr)
Historique du 10e Régiment du Génie (gallica.bnf.fr)
CRID 14-18 : Collectif de Recherche International et de Débat sur la guerre de 1914-1918
Quand la guerre sort des livres d’histoire, elle prend un nom et une vie… trop courte.